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7 décembre 2012 5 07 /12 /décembre /2012 14:32






Steven Amsterdam donne très peu d’explications pour justifier l’existence du monde qu’il a imaginé. L’étendue des désastres semble mondiale ; la période, très proche. On ne sait pas non plus si une apocalypse s’est produite ou non au cours des nombreuses ellipses qui marquent le rythme du récit. Lorsque nous rencontrons le narrateur, il est encore enfant et passe le réveillon du nouvel an à la campagne, entre un père et une mère marqués par des dissensions concernant l’état du système et des grands-parents qui essaient de tempérer la fatalité d’une situation. Déjà, la société semble atteinte d’un mal dont on ne connaît pas le nom. Malgré tout, la vie semble se poursuivre sans trop de heurts. Plus tard, on retrouve le narrateur dans son adolescence. Beaucoup de choses semblent avoir changées, avec notamment l’émergence de zones rurales et urbaines fermement délimitées. Des maisons laissées à l’abandon sont livrées au pillage. Pourquoi ces abandons ? Pourquoi la nécessité de commettre des vols ? Débrouillez-vous pour le comprendre…
Ainsi de suite, on suit le narrateur au cours de plusieurs étapes de son existence. Entre celles-ci, c’est le grand vide et on ne peut qu’émettre des suppositions concernant les évènements qui se sont produits entre temps. L’apocalypse est-elle survenue au cours de ces périodes non mentionnées ? Le narrateur est-il né après l’apocalypse ? A moins que son existence évolue parallèlement à l’avènement de cette fin du monde soupçonnée…


Ces interrogations peuvent sembler stimulantes et laisseraient croire –en théorie- qu’elles participent à la création d’une atmosphère malsaine vouée au non-dit et à la dissimulation. En réalité, cette économie des mots de l’auteur nuit à la crédibilité du monde qu’il imagine. Les périphrases évasives portent peu à peu à penser que Steven Amsterdam peine à imaginer l’état d’un monde qui s’autodétruit, et les rares évocations que l’on rencontre nous ramènent à des conceptions catastrophiques qui n’ont rien d’original : éloignement de l’homme d’avec la nature, migrations, monétisation des rapports humains, perte de la confiance, formations de tribus isolées, chamanisme… Le tout s’accompagne d’un discours écologisant simple et naïf –les hommes vont mourir parce qu’ils ont perdu tout contact authentique avec la nature- et de prosélytisme socialiste tout aussi réducteur –l’union fait la force.


Vraiment prégnantes au début du roman, ces considérations ennuient voire agacent. Le prêchi-prêcha moralisateur se contente d’accuser sur un ton blasé et se plaît à se rouler dans la fange du fatalisme. Mais le ton évolue parallèlement à l’existence du narrateur… Alors que sa naïveté d’enfant, sa complaisance provocatrice d’adolescent, son cynisme blasé de jeune adulte et ses rêveries utopiques de trentenaire se fondaient sur tous les clichés du genre, les quelques dernières phases de son évolution nous présentent un personnage plus complexe, tiraillé entre ses espoirs, sa lucidité et sa résignation. Les dernières pages sont d’une grande force évocatrice et laissent apercevoir l’originalité de la vision d’un écrivain.


Devant la puissance de cette dernière partie, l’ensemble du roman mériterait d’être reconsidéré. Steven Amsterdam a-t-il volontairement réduit la première partie du livre à néant pour mieux montrer l’évolution de la conscience de son personnage ? On peut aussi très bien supposer que cette transition n’était pas volontaire mais qu’elle résulte simplement d’une interprétation possible de cette projection catastrophique. Je ne suis qu’à moitié convaincue, parce qu’une fin riche de sens ne peut pas faire tout le mérite d’un texte.


Prophète rattrapé par ses visions ?

Citation:

« - […] A notre époque, à votre époque, il y aura des pannes irréparables. De nouvelles maladies inguérissables. L’eau deviendra aussi précieuse que le pétrole. Et vous, vous devrez vous occuper d’une génération de parents gras et inutiles. […] Tu peux promettre d’être aussi gentil que tu veux, mais représente-toi ceci : l’avenir est un hôpital bourré de malades, de blessés, de gens sur des civières dans les couloirs, et soudain la lumière s’éteint, l’eau est coupée, et tu sais au fond de ton cœur que ça ne reviendra pas. »




Les formules creuses de ce genre remplissent trop souvent les trois quarts du roman :

Citation:

« Peut-être est-ce cela, la vie, en réalité. Le rideau se lève. Le rideau retombe. »




Citation:
« L’époque est à la violence. Conflits frontaliers, grippe, changement climatique, et toutes ces migrations qui en ont découlé –rien de tout cela n’a favorisé l’esprit de camaraderie. »
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