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23 février 2012 4 23 /02 /février /2012 10:09




Louise Wimmer tombe du ciel : on la rencontre dans sa voiture, son logement principal, l’endroit où elle dort et son dernier espoir de redonner de la dignité à son existence. Cyril Mennegun a choisi de passer sous silence les raisons qui ont conduit Louise à tomber dans cette misère. Les indices nous sont révélés au compte-goutte et avec l’économie de mots qui caractérise l’ensemble du film. Ils nous permettent de nous faire une vague idée, à l’issue du film, de ce qui fut le passé de Louise, mais sa trame est si ténue qu’il ne suffit pas à individualiser réellement le personnage. Louise Wimmer peut être le devenir de chacun d’entre nous.


Reste à savoir si n’importe qui d’entre nous, une fois devenu Louise, pourrait encaisser les évènements à sa manière. Pliée en quatre dans le coffre de sa voiture, elle se réveille à l’aube pour faire le ménage dans les chambres d’un hôtel. Elle subit les brimades d’un petit chef bardé d’œillères, prend des douches en quatrième vitesse dans les toilettes d’un PMU, récupère les petits objets de valeur pour se faire de la monnaie d’appoint, zigzague entre ses différents créditeurs, et essaie tant bien que mal de permettre à sa voiture de survivre. Cette façon de vivre entraîne une usure dont les traces apparaissent de manière criante sur le corps de Louise. Corinne Masiero, l’actrice qui l’incarne, semble se mépriser totalement dans la poursuite d’une existence qui n’a plus rien d’agréable à offrir. Ses gestes sont parfois lents et éprouvés : ils traduisent un épuisement bien compréhensible, mais se retrouvent totalement dynamisés l’instant d’après. Louise Wimmer se dépasse sans cesse et fait craindre au spectateur le moment fatal où elle lâchera, car il semble impossible que cela n’arrive pas.

Si cette existence pouvait être adoucie par la présence de proches compréhensifs et protecteurs, Louise Wimmer pourrait s’abandonner dans le confort d’une proximité chaleureuse, mais ce n’est pas tout à fait le cas. Bien sûr, elle est entourée de quelques connaissances qui n’hésitent pas à lui donner un coup de main lorsqu’elle en a besoin, comme Didier qui l’aide à réparer sa voiture, Nicole qui lui fait crédit de ses consommations au PMU et qui réceptionne son courrier, ou encore Mlle Rebihi, assistante sociale fraîchement émoulue que ses convictions encore intactes permettront à Louise de vivre de manière décente ; mais Louise reste distante et ne révèle à personne ses conditions de vie. Cette vie qu’elle mène à la façon d’un combat trouve son sens dans cette unique volonté qu’elle a de s’en sortir seule. Les autres et leur empathie apparaissent comme un frein qui risquerait bien d’émousser son endurance et sa force.


Finalement, on se sent ridicule devant ce film. Il donnerait presque honte d’être resté assis confortablement dans une salle chauffée pendant une heure vingt. Mais le pire constat est le suivant : en s’attaquant au sujet de la pauvreté et de la précarité dans les pays modernes à travers l’individu Louise Wimmer, Cyril Mennegun avait dû comprendre que la façon la plus efficace d’éveiller les consciences aux misères d’autrui était de leur faire comprendre que ces misères pouvaient devenir leurs beaucoup plus rapidement qu’ils ne le pensent. Et c’est déroutant de voir à quel point l’égocentrisme agit de manière radicale.
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