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5 mars 2011 6 05 /03 /mars /2011 19:12



Résumé éditeur :
Citation:
Ouvrage synthétique et pédagogique, les 'Cinq leçons sur la psychanalyse' retracent les origines de la psychanalyse et exposent les grands traits de la méthode. Freud y explique l'hystérie, le refoulement et la résistance ainsi que l'interprétation des rêves. Focalisant sur les actes manqués ou autres célèbres lapsus, le maître éclaire la sexualité infantile et s'interroge sur la libido à travers le complexe d'OEdipe. Enfin, la névrose illustre la régression, le transfert et la sublimation.


Rien de tel que ces cinq leçons pour s'initier à la psychanalyse de Freud... On apprend à travers ses discours l'origine de la psychanalyse avec Breuer et ses premières applications de l'hypnose sur les hystériques (les hystériques représentaient alors toutes les personnes atteintes de troubles mentaux : c'était simple et radical), le passage de l'hypnose à la méthode psychanalytique tant connue et les définitions des différents concepts de la psychanalyse.

Freud nous explique ce qu'est une névrose...

« Les névroses sont aux perversions ce que le négatif est au positif ; en elles se retrouvent, comme soutiens des complexes et artisans des symptômes, les mêmes composantes instinctives que dans les perversions ; mais ici, elles agissent du fond de l’inconscient ; elles ont donc subi un refoulent, mais on pu, malgré lui, s’affirmer dans l’inconscient. »

... le processus de la sublimation :

« Les tendances qui composent l’instinct sexuel se caractérisent précisément par cette aptitude à la sublimation : à leur fin sexuelle se substitue un objectif plus élevé et de plus grande valeur sociale. C’est à l’enrichissement psychique résultant de ce processus de sublimation, que sont dues les plus nobles acquisitions de l’esprit humain. »

Il revient sur les critiques qui lui ont été maintes fois adressées à l'égard de l'utilisation quelque peu excessive du terme de sexualité :

« Peut-être me fera-t-on l’objection que tout cela n’est pas de la sexualité. J’emploie le mot dans un sens beaucoup plus large que l’usage ne le réclame, soit. Mais la question est de savoir si ce n’est pas l’usage qui l’emploie dans un sens beaucoup trop étroit, en le limitant au domaine de la reproduction. »

Très intéressant aussi, Freud avance des théories que je trouve absolument pertinentes concernant la cause de l'apparition des névroses et la cause des difficultés qu'éprouve le patient lorsqu'il doit s'en guérir :

« Nous voyons que les hommes tombent malades quand, par suite d’obstacles extérieurs ou d’une adaptation insuffisante, la satisfaction de leurs besoins érotiques leur est refusée dans la réalité. Nous voyons alors qu’ils se réfugient dans la maladie, afin de pouvoir, grâce à elle, obtenir les plaisirs que la vie leur refuse. […] Ajoutons que la résistance de nos malades à se guérir ne relève pas d’une cause simple, mais de plusieurs motifs. Ce n’est pas seulement le « moi » du malade qui se refuse énergiquement à abandonner des refoulements qui l’aident à se soustraire à ses dispositions originelles ; mais les instincts sexuels eux-mêmes ne tiennent nullement à renoncer à la satisfaction que leur procure le substitut fabriqué par la maladie, et tant qu’ils ignorent si la réalité leur fournira quelque chose de meilleur. »

Mais je ne vais pas vous dévoiler toutes les idées qui sont exposées dans ces cinq leçons... Elles sont nombreuses mais exprimées d'une manière simple et compréhensible par le plus grand nombre. Une très bonne manière donc de s'initier à la pensée de Freud.
Autre atout de la prose de Freud : elle est très littéraire et s'accompagne souvent d'images fortes à la limite de la poésie. Je ne peux pas résister à vous fournir un petit exemple... dentsblanches

Freud cherchant à définir les hystériques et névrosés :

« Nous pouvons grosso modo résumer tout ce qui précède dans la formule suivante : les hystériques souffrent de réminiscences. Leurs symptômes sont les résidus et les symboles de certains évènements (traumatiques). Symboles commémoratifs, à vrai dire. Une comparaison nous fera saisir ce qu’il faut entendre par là. Les monuments dont nous ornons nos grandes villes sont des symboles commémoratifs du même genre. Ainsi, à Londres, vous trouverez, devant une des plus grandes gares de la ville, une colonne gothique richement décorée : Charing Cross. […] Ces monuments sont des « symboles commémoratifs » comme les symptômes hystériques. La comparaison est donc soutenable jusque-là. Mais que diriez-vous d’un habitant de Londres qui, aujourd’hui encore, s’arrêterait mélancoliquement devant le monument du convoi funèbre de la reine Eléonore, au lieu de s’occuper de ses affaires avec la hâte qu’exigent les conditions modernes du travail, ou de se réjouir de la jeune et charmante reine qui captive aujourd’hui son propre cœur ? Ou d’un autre qui pleurerait devant « le monument » la destruction de la ville de ses pères, alors que cette ville est depuis longtemps sortie de ses cendres et brille aujourd’hui d’un éclat plus vif encore que jadis ? Les hystériques et autres névrosés se comportement comme les deux Londoniens de notre exemple invraisemblable. »

N'est-ce pas tendre et touchant ? What a Face

Si vous souhaitez vous lancer dans la lecture de Freud, n'hésitez-pas, commencez par ce bouquin !
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5 mars 2011 6 05 /03 /mars /2011 19:08

http://www.librairiepantoute.com/img/couvertures_300/malaise-dans-la-culture-10.jpg


Considéré comme étant l'un des livres les plus pessimistes de Freud, cette raison s'explique souvent par le fait que Freud souffrait alors horriblement de son cancer à la mâchoire qui nécessita une trentaine d'opérations, pour aboutir au résultat que l'on connaît...

Pourtant, Freud n'est pas totalement pessimiste. Il est conscient des bienfaits que la culture apporte aux hommes, même si le prix à payer est relativement élevé. Elle représenterait un frein à la réalisation du but ultime de tout homme : accéder au bonheur. Pour contrer cette difficulté, Freud énumère trois types de réactions :

Citation:


La vie telle qu’elle nous est imposée est trop
lourde pour nous, elle nous apporte trop de douleurs, de déceptions, de tâches
insurmontables. Pour la supporter, nous ne pouvons nous passer de moyens
palliatifs […]. De tels moyens, il en est peut-être de trois sortes : de
puissances diversions qui nous font mépriser notre misère, des satisfactions de
substitution qui la réduisent, des stupéfiants qui nous y rendent
insensibles.



Freud redonne aux activités culturelles leur véritable valeur. L'art, la recherche ne constitueraient plus des spéculations purement intellectuelles mais ne seraient que le rebut des pulsions sexuelles des hommes passées à travers le filet de la sublimation :

Citation:


Une autre technique de défense contre la
souffrance se sert des déplacements de libido que permet l’appareil de l’âme,
par lesquels sa fonction gagne tant en souplesse. La tâche à accomplir consiste
à placer autre part les buts pulsionnels, de telle sorte qu’ils ne puissent
être atteints par les frustrations du monde extérieur. La sublimation des
pulsions prête ici son secours. C’est lorsqu’on s’entend à élever suffisamment
le gain de plaisir issu des sources du travail psychique et intellectuel, que
l’on obtient le plus.



Freud identifie également le surmoi, qu'il décrit de cette façon :

Citation:


L’agression est introjectée, intériorisée, mais
renvoyée à vrai dire là d’où elle est venue, c’est-à-dire retournée contre
notre propre moi. Elle y est prise en charge par une partie du moi, le surmoi,
qui s’oppose au reste et exerce en tant que « conscience morale » la
même sévère agressivité contre le moi que celle que le moi aurait volontiers
satisfaite sur d’autres individus étrangers. La tension entre le sévère surmoi
et le moi qui lui est soumis, nous la nommons conscience de culpabilité ;
elle se manifeste comme besoin de punition.



Citation:


Le surmoi est une instance déduite par nous, la
conscience morale une fonction que nous lui attribuons parmi d’autres, qui doit
surveiller et juger les actions et les intentions du moi, et qui exerce une
activité de censure. Le sentiment de culpabilité, la dureté du surmoi, sont
donc la même chose que la sévérité de la conscience morale, il est la
perception impartie au moi d’être ainsi surveillé, l’évaluation de la tension
entre ses aspirations et les exigences du surmoi, et la peur de cette instance
critique, peur qui est au fondement de toute la relation ; le besoin de
punition est une manifestation pulsionnelle du moi devenu masochiste sous
l’influence du surmoi devenu sadique, c’est-à-dire qu’il utilise une part de la
pulsion présente en lui, de destruction interne pour en faire une liaison
érotique au surmoi.



Pour Freud, la mise en place d'un tel instrument est une source de grand malheur chez les hommes, faisant naître en eux ce qu'il nomme le sentiment de culpabilité :

Citation:


Ici, le renoncement pulsionnel n’aide pas
suffisamment, car le désir demeure et ne saurait se dissimuler devant le
surmoi. Un sentiment de culpabilité surviendra malgré le succès du renoncement,
et ceci est un grand inconvénient économique de l’instauration du surmoi, ou
pour le dire autrement, de la formation de la conscience morale. Désormais, le
renoncement pulsionnel n’a plus un plein effet libérateur, l’abstinence
vertueuse n’est plus récompensée par l’assurance de l’amour ; contre un
malheur extérieur menaçant –perte d’amour ou punition de la part de l’autorité
extérieure- on a échangé un malheur intérieur permanent, la tension de la
conscience et de la culpabilité.



Incapable de répondre complètement aux normes exigées par la culture, l'homme devient névrosé. De grandes psychoses collectives s'établissent en parallèle. Ainsi Freud désigne-t-il la religion :

Citation:


Mais on affirme que chacun de nous, sur un point
ou un autre, se comporte comme le paranoïaque, corrige par une formation de
désir un aspect du monde qui lui est intolérable, et inscrit ce délire dans la
réalité. Il est un cas qui revêt une importance particulière, lorsqu’un assez
grand nombre d’hommes font ensemble la tentative de s’assurer du bonheur et de
se protéger contre la souffrance par une reconfiguration délirante de la
réalité. C’est comme un tel délire de masse que nous devons aussi caractériser
les religions de l’humanité. Naturellement, on ne reconnaît jamais le délire
quand on y participe.



Citation:


La religion compromet ce jeu du choix et de
l’adaptation en ce qu’elle impose à tous la même manière d’acquérir le bonheur
et de se protéger contre la souffrance. Sa technique consiste à rabaisser la
valeur de la vie et à déformer de façon délirante l’image du monde réel, ce qui
présuppose d’intimider l’intelligence. A ce prix, à travers la fixation
violente d’un infantilisme psychique et l’intégration à un délire de masse, la
religion parvient à épargner à un grand nombre d’hommes la névrose
individuelle.



Plus loin, Freud décrit l'enjeu de la culture:

Citation:


Et je pense que désormais, le sens du
développement de la culture n’est plus obscur pour nous. Il doit nous montrer
le combat entre Eros et la mort, entre la pulsion de vie et la pulsion de
destruction, tel qu’il s’accomplit dans l’espèce humaine.



Il décrit les regroupements exigés par la culture et révèle ce qui lui semblent être les véritables motivations des communautés telles que la famille :

Citation:


La fondation d’une famille était probablement en
corrélation avec le fait que le besoin de satisfaction génitale ne survenait
plus comme un hôte qui apparaît soudain chez quelqu’un et ne donne après son
départ plus de nouvelles pendant longtemps, mais comme un locataire
s’installant à demeure chez l’individu. Par là, le mâle trouvait un motif pour
garder auprès de lui la femme –ou plus généralement, les objets sexuels ;
les femelles, qui ne voulaient pas se séparer de leurs petits sans elles privés
de secours, durent aussi, dans l’intérêt de ceux-ci, demeurer auprès du mâle,
plus fort.





Faisant
preuve d’une grande lucidité, il remet en place les idéaux formés par la
culture et redonne aux grandes vertus leur véritable valeur en mettant à jour
les motivations réelles qui sont mises en jeu
:

Citation:


L’éthique dite « naturelle » n’a ici
rien à offrir si ce n’est la satisfaction narcissique de pouvoir se considérer
meilleur que les autres. L’éthique qui s’appuie sur la religion fait intervenir
ici ses promesses d’un Au-delà meilleur, je pense qu’aussi longtemps que la
vertu ne sera pas déjà récompensée sur terre, l’éthique prêchera en vain.



Freud est conscient du fait que son livre n'est pas réconfortant, mais bien loin de s'en excuser, il se donne raison et affirme :

Citation:


Aussi le courage me manque-t-il pour m’élever en
prophète devant mes semblables, et je m’incline devant le reproche qu’ils me
feront de ne savoir pas leur apporter du réconfort, car au fond, c’est ce
qu’ils réclament tous, les révolutionnaires les plus sauvages avec non moins de
passion que les croyants les plus pieux et les plus paisibles.
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5 mars 2011 6 05 /03 /mars /2011 17:46



Mes premières impressions lorsque j’entends parler de ce livre…
Pour tout dire, pas grand-chose… Il est « sympa », parce qu’il se lit sans déplaisir mais qu’il ne restera certainement pas gravé longtemps dans mes souvenirs des meilleurs livres qui sont passés entre mes mains.

Comme je suis gentille, je commence par certaines qualités indéniables de ce bouquin. A commencer par les descriptions des lieux que je trouve très inventives Razz :

Citation:
Nous habitions Point Dume, une langue de terre qui avançait dans la mer comme un sein dans un film porno, au nord du croissant de la baie de Santa Monica. Point Dume est une sorte de lotissement dépourvu d’éclairage municipal, une excroissance suburbaine chaotique couverte d’un réseau si dense de rues tortueuses et d’impasses que, j’avais beau y habiter depuis vingt ans, je m’y perdais encore dès qu’il pleuvait ou qu’il y avait du brouillard, et j’errais souvent à l’aveuglette dans les rues situées à moins de deux blocs de chez moi.


On trouve aussi des pointes d’humour noir qui enthousiasment au début, et puis, à force de les voir se répéter sans cesse, sans que le fond de leur propos n’évolue réellement, on finit par sourire, puis par passer outre sans même les remarquer encore. Dommage, le soufflé retombe vite :

Citation:
Elle était pourtant adorable, mon Harriet : vingt-cinq ans qu’elle tenait le coup à mes côtés ; elle m’avait donné trois fils et une fille, dont j’aurais joyeusement échangé n’importe lequel, voire les quatre, contre une Porsche neuve, ou même une MG GT ’70.


(Marrant au début, et puis au bout de la 15e lecture du même genre d’opinion, ça commence à devenir un peu lourd quand même non ?)

L’idée du chien comme représentant animal de l’auteur est sympa (encore une fois j’utilise ce mot pour marquer le peu d’enthousiasme ou de déception que m’a procuré ce livre). L’idée donne lieu à des passages mémorables :

Citation:
Il était un chien, pas un homme, un simple animal qui en temps voulu deviendrait mon ami, emplirait mon esprit de fierté, de drôlerie et d’absurdités. Il était plus proche de Dieu que je ne le serais jamais, il ne savait ni lire ni écrire, et cela aussi était une bonne chose. C’était un misfit et j’étais un misfit. J’allais me battre et perdre ; lui se battrait et gagnerait. Les grands danois hautains, les bergers allemands arrogants, il leur flanquerait une bonne dérouillée, il en profiterait même pour les baiser, et moi je prendrai mon pied.


Et tout le reste du livre suit le schéma évoqué par ce passage… Stupide prend de l’ampleur dans le foyer, triomphe des autres toutous du voisinage, pendant que Henry se traîne la patte dans son foyer en désintégration, de plus en plus seul et perdu (la fin est assez tragique et pas décevante, comme beaucoup le trouvent pourtant).


Spoiler:
 


Isidore Ducasse a écrit:
Au final, j'ai aimé. L'idée de centrer le livre sur un animal, à mon avis, rehausse bien cette sensation sous-latente de vide dans la vie du personnage, son manque, sa douleur d'être passé à côté de quelque chose. Quand on préfère son chien à ses enfants, c'est qu'il y a un problème. Le personnage n'est pas réellement attachant, mais on le comprend facilement, et il est tout de même touchant.


N’empêche, c’est vrai qu’il n’avait pas une vie facile ce pauvre Henry… Mais si c’est pour notre plaisir ! dentsblanches

Et enfin, une phrase culte pour conclure :

Citation:
L’herbe élargit la conscience des cerveaux ratatinés. Tu en as besoin parce que tu es un crétin.

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5 mars 2011 6 05 /03 /mars /2011 15:41
Casse-Pipe (1949) de Louis-Ferdinand Céline




Résumé :
Citation:
Ce roman inachevé retrace le rude apprentissage de la condition militaire par un jeune engagé, avant la Première Guerre mondiale.


Hum… Pas très parlant ce résumé… J’ai trouvé mieux :

Citation:
C'est là le manifeste antimilitariste de Louis Ferdinand, conséquence d'un réel engagement le 28 septembre 1912 dans le douzième régiment (qui devient le dix-septième dans Casse-pipe) décrit avec désespoir dans le Carnet du cuirassier Destouches. Ce carnet incomplet recense des pensées sur l'armée, les comportements des soldats, son incompréhension de la hiérarchie et son désir de désertion qui se ressentiront dans Casse-pipe.

Source : link

A noter que les notes du Carnet du cuirassier Destouches ont été écrites en 1913 à l’âge de 17 ans.

Avec ce texte, on est vraiment confronté au style de Céline dans tout ce qu’il a de plus inimitable. C’est truffé d’une ponctuation expression, d’interjections, d’onomatopées, de cris… A en devenir parfois un peu incompréhensible, il faut bien l’avouer…
Voyage au bout de la nuit était dans ce sens beaucoup plus abordable et même s’il préservait le style propre à Céline, il ne constituait pas non plus une limite à sa compréhension, ce qui est le cas dans Casse-Pipe. L’histoire se traîne un peu en longueur… Casse-Pipe, un roman inachevé ? La question que je me suis posée, en l’ayant terminé, était la suivante : si Céline en avait terminé la rédaction, combien de pages aurait-il fait ? Je pense que ç’aurait été un monstre :suspect :

Bon, mis à part ça, le style, l’expression, le rythme, sont toujours aussi délectables. D’autres le disent bien mieux que moi :

Citation:
Il nous brosse un tableau brut, une véritable "croûte" : point de description construite ici ; les personnages, les lieux, les actions, tout est entr’aperçu au travers de ces cris quasi incompréhensibles pour qui n'est pas familier de l'écriture de Céline ; cris bestiaux teintés de haine, de peur et de paresse.

Source : link

Mais surtout, chapeau le rythme ! Certaines tirades pourraient presque être mises en chanson :

« Y a des malheureux partout, mais la façon la plus pire c’est de briffer gros comme ça la fouasse pour un sou par jour !... Que je dis ! Que je cause ! Bonjour ! Au revoir, monsieur l’Hôpital ! Et chiez donc, bonnes sœurs ! Pauvres de nous ! Bêtes maudites ! Vivement la guerre qu’on se tue ! Pauvres de nous ! Bêtes à mitraille ! Ecole à feu ! Il a bien de muter, l’infect doublard ! Orfize de mon cœur ! Je l’encadrais ! Je lui faisais la cravate des dimanches avec son boyau ! et voilà ! Parole d’ancien !... »

Et le vocabulaire est délectable aussi… Razz Entre les ramponneaux qui glaviotent avant d’entrer dans leur canfouine et les gandins qui poulopent dès lors qu’il se met à lansquiner un peu, vous n’aurez pas fini d’en apprendre du beau de l’argot !

« C’est la mer furieuse sens dessus dessous, la tempête à sauve qui peut… Tous les raccrochés par les poils, en bas dans la sciure, caracoleux, les nuages du pétrin plein la vue, jusqu’à l’instant où tout désossé, s’arrache, disloque, propage à dame, s’épanouit ! Bonhomme ! Sanfrusquin ! Pigeon vole ! Bascule ! Vidés ! labourent fendus ! Au ventrail hurlent ! A folles embardées, arrachent encore ! Ravinent à mort plein les sabots ! Epouvantable spectacle ! »

Et les descriptions, toujours aussi sordides dans leur description d’une réalité qui tâche :

« Le brigadier Le Meheu il était martyr des furoncles. Toujours un autre qui lui perçait. Ca lui mettait du pus partout. Au pied à terre, à la manœuvre, pour décoller sa culotte, il poussait des gueulements horribles. Il se montrait plus au major, il s’entaillait tout ça lui-même, franchement, à plein lard, au couteau. Pflac ! Il en avait eu des centaines de furoncles, un peu partout. Il se pansait avec de la paille, du cerfeuil et de l’ail. Jamais lui des cataplasmes, des cochonneries à la bouse, il en voulait pas, rien que du végétal, il en était fier. C’était toute une cérémonie la confection des emplâtres. »

Bref, ce petit Casse-Pipe est à réserver pour ceux qui se délectent du style de Céline. Sinon, mieux vaut passer son chemin.
A savoir, il existe une adaptation illustrée de ce roman effectuée par Jacques Tardi.




Citation:
De cette transposition du vécu en mots, Jacques Tardi a fait à son tour une transposition visuelle, avec la même fidélité à la sensibilité célinienne dont il avait déjà fait preuve dans son travail d’illustration de Voyage au bout de la nuit. Les dessins en noir et blanc, les nuances de gris de Tardi, collent parfaitement à la noirceur, le désespoir, mais aussi l’humour qui hantent les personnages du roman. En découle une œuvre à part entière qui n’est pas seulement
une illustration mais surtout une variation en images. Du grand art !


Source : link
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4 mars 2011 5 04 /03 /mars /2011 21:23
L'homme boîte publié en 1973



Présentation de l'éditeur :

Citation:
Kôbô Abé est un des tous premiers écrivains japonais d'aujourd'hui. Redoutable parabole des temps modernes, son roman L'Homme-boîte nous interroge un peu à la manière des pièces de Beckett. Cet homme qui a enfoui sa tête et le haut de son corps dans une boîte en carton n'est pas un Diogène cynique réfugié dans un tonneau par mépris de l'humanité. C'est un anti-héros, un être mythique dont le mal profond est l'impuissance. Un voyeur aussi, car la seule relation qu'il peut établir avec le monde extérieur se fait par l'intermédiaire de son regard. Ce personnage anonyme a placé un écran entre les autres et lui afin de se protéger des contraintes de la société et la boîte est pour lui à la fois sécurisante et protectrice. Tourmenté et solitaire, il est en même temps capable d'humour et même d'amour. Pour Kôbô Abé, qui est aussi médecin, une identité détruite peut en quelque sorte être "refaçonnée". Et c'est grâce à la femme qu'il aime que "l'homme-boîte" sortira de son carcan volontaire et rejoindra la vie.


Comme certains d'entre vous, j'ai trouvé le style d'Abé souvent lourd et pompeux, n'hésitant pas à nous bassiner d'effets spéciaux sans que l'on sache où il veut en venir. J'ai parfois eu l'impression que tout cela ne servait qu'à cacher un éventuel manque d'idées, ce que je n'aurais pas trouvé étonnant vu que l'histoire tourne vite en rond.

Le début m'avait pourtant bien plu. L'histoire est originale, le style n'est pas encore trop pompeux, et puis tout se dégrade au fil des pages. Il vient se mêler une histoire de vrai/faux homme-boîte où je me suis bien emmêlée les pinceaux...

Les premières pages sont intrigantes :


Citation:
Il est certain que l’homme-boîte ne se remarque pas facilement. Il est comme une ordure qui aurait été jetée sous un pont ou bien entre une palissade et des v-c publics. Mais il y a une différence entre ne pas être visible et ne pas être remarqué. Comme il ne s’agit pas d’un être particulièrement remarquable, il y a toutes les chances que tu aies eu l’occasion d’en apercevoir un. Toi, par exemple, il t’a sûrement sauté aux yeux. Mais je conçois bien que, par ton attitude, tu aies refusé de le reconnaître. Tu n’es pas la seule personne à le regarder sans le voir ; tu détournes les yeux instinctivement. C’est comme si, la nuit, tu portais des lunettes très sombres ou un masque, tu ne pourrais éviter que l’on te prenne pour une créature très timide, ou pour quelqu’un qui mijote un mauvais coup.

Citation:

La seule erreur de A. était d’être plus conscient qu’un autre de sa condition d’homme-boîte. Vous ne pouvez pas vous moquer de lui. Si vous êtes un de ceux qui ont imaginé dans leurs pensées, même une fois, une ville anonyme qui existerait seulement pour les habitants anonymes, une ville où ce qu’on appelle les portes seraient ouvertes à tous sans discrimination, une ville où, parmi ceux qui vous sont étrangers, vous n’auriez pas besoin d’être sur la défensive, où vous pourriez marcher sur la tête ou dormir dans la rue sans qu’on vous dise rien, où vous pourriez chanter si vous êtes fier de votre talent, et où, quand vous avez fait tout cela, vous pourriez, si vous le désiriez, vous mélanger à la foule anonyme –alors, vous ne devriez pas être indifférent, car vous pouvez toujours être exposé aux mêmes dangers que lui. C’est pourquoi, il ne faut jamais pointer un fusil devant un homme-boîte.


Passage lourd dont Abé a le génie ( dentsblanches ). Le passage est court, je vous épargne le pire :

Citation:
Oui ; peut-être est-ce moi qui suis en train d’écrire en t’imaginant, toi qui es en train d’écrire en m’imaginant, moi.


Bon, le livre est aussi parcouru de photographies accompagnées de commentaires en rapport avec l'histoire plutôt bien trouvés. Vous pouvez vous contenter de cet album-photo si vous avez envie d'avoir une idée du contenu du bouquin sans le lire en entier dentsblanches

Citation:
Quand je pense à de petites choses, je crois que j’aimerais continuer à vivre. Des gouttes de pluie… des gants trempés qui ont rétréci… Quand je contemple quelque chose de trop grand. J’ai envie de mourir… le building du Parlement ou la carte du monde…


Mais je suis trop méchante... Ce livre n'est franchement pas mauvais, il est seulement agaçant, parce qu'on a parfois envie de dire à Kôbô Abé d'arrêter de vouloir faire de l'esprit à tout prix, parce que ça ne lui réussit pas tellement au bonhomme... C'est un peu le même sentiment qu'on ressent à la lecture des livres d'Amélie Nothomb : ce n'est pas mauvais, il y a plein de bonnes idées mais il y a des passages qui sonnent cruellement faux et qui donnent envie de reposer le bouquin aussitôt. Et ça gâche le plaisir, c'est dommage...
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